Comme quoi tout arrive, à mille lieux du gloubiboulga technologico-sécuritaire de la loi sur le renseignement, le gouvernement vient de soumettre au peuple – je dis bien, au peuple – un texte qui tient la route sur le numérique, le projet de loi pour une République numérique, sous la forme d’une démarche collaborative inédite, chacun pouvant donner son avis sur les articles du gouvernement, voire en proposer d’autres. Mon chouchou est immédiatement devenu l’article sur la neutralité du net, proposé par le gouvernement, pour lequel je vous enjoins fortement à voter. Pour l’instant, les contributions citoyennes sont plutôt de bonne qualité, malgré quelques inévitables trolls, des hors sujets et une obsession pour le logiciel libre un peu lassante. L’ensemble manque sans doute de quelques sanctions, par exemple sur la neutralité du net ou les pratiques déloyales éventuelles des comparateurs et sites d’avis, mais ça me semble être un bon premier pas.
Un objet parcourt le texte, la donnée personnelle, et je trouve dommage que sa définition et ses modalités de détermination fonctionnelle et technique soient laissées aux textes existants – c’est-à-dire à la loi informatique et libertés. En effet, certaines données sont aujourd’hui considérées comme permettant de déterminer une personne physique, comme l’adresse IP, voire en dernière extrémité un cookie de tracking publicitaire, et cela mériterait discussion : combien de personnes physiques réelles se cachent derrière une adresse IP, en particulier dans un monde IPv4 où le NAT règne de facto en maître ? De plus, plusieurs articles définissent des droits de transfert ou de destruction des données personnelles, or ce n’est pas parce qu’il est possible théoriquement de retrouver le propriétaire d’une donnée que cela est facile, économiquement viable pour le service, voire possible comme dans le cas de la mort numérique. Il me semble qu’une méthodologie technique commune d’identification avec autorisation d’utilisation préalable devrait être envisagée, quitte à remettre les détails techniques à des décrets d’application, les technologies pouvant rapidement évoluer en ces matières. Si je trouve une rédaction appropriée, je proposerais peut-être un article en ce sens…